TIAO XI
TIAO XI
调 息
PRESENTATION
Les pratiques de « régulation du souffle Tiao Xi » sont au qigong ce que le « pranayama » est au yoga. Un ensemble d’exercices basés sur le contrôle de la respiration par l’esprit. Il s’agit là d’un domaine peu connu, et donc peu pratiqué.
Tiao Xi, le travail sur la respiration, est pourtant un des trois fondamentaux (avec le travail sur le corps physique, et celui sur l’esprit) sur lesquels s’appuient toute les pratiques de qigong, au sens traditionnel du terme.
Dans le système indien du yoga, plus précisément du Hatha Yoga, la tradition classe en huit ensembles, ou « membres », les différents exercices. Ce sont Yama (les abstinences : ne pas tuer, ne pas…), Niyama (les observances : être généreux, être…), Asana (les positions du corps : la salutation au soleil, le lotus…), Pranayama (les exercices respiratoires…), Pratyahara (le retrait des sens), Dharana (la concentration sur un objet), Dhyana (la méditation sans objet) et le Samadhi (l’accomplissement ultime).
Même si ces huit « membres » fonctionnent ensembles, sont liés dans l’exercice global du Hatha Yoga, ils forment néanmoins, dans la pratique, un ensemble hiérarchisé.
Ainsi, l’on ne commencera les exercices physiques que sont les asanas que lorsque le « terrain » aura été préparé par le respect des observances et abstinences. De même que le corps physique, lorsqu’il aura été dénoué, étiré, apaisé par les asanas, saura accueillir sans danger les exercices respiratoires du Pranayama.
Dans le système du Zhineng Qigong, de fait, Tiao Xi ne semble pas important. Pourtant, les exercices respiratoires sont bien présents, mais ils ne sont généralement introduits que lors de la présentation de la « troisième méthode Wu Yuan Zhuang ».
A l’inverse, le Guolin Qigong est une pratique de Tiao Xi, intense, variée et entièrement basée sur la respiration, et ce dès le début de l’apprentissage.
Pourtant, s’il doit y avoir une constance et une règle dès que l’on « touche » au domaine de la respiration, c’est la prudence.
Et l’on veillera donc dans ce domaine à éviter de s’écarter des pratiques de Tiao Xi telles qu’elles sont proposées dans chaque système de qigong.
Ainsi, nous nous en tiendrons ici, dans le cadre du Zhineng Qigong, aux techniques enseignées par son créateur, le docteur Pangming.
Une présentation de 3 techniques de respiration a déjà été faite précédemment :
http://qigonghautescevennes.com/2016/12/techniques-de-respiration-dans-le-zhi-neng-qigong.html
TIAO XI
Le caractère chinois pour xi est 息. En haut, zi 自 (soi même), en bas xin 心 (le cœur, mais aussi l’esprit shen). Aussi, xi représente la réunion entre la conscience de soi et le cœur/esprit. Le premier sens de xi est « respiration, haleine, souffle ». Un autre sens est « se reposer, s’arrêter, cesser ». L’on retrouvera ce sens dans le cadre des techniques diverses de rétention du souffle. Il existe encore pour xi un autre sens, dont l’origine remonte au I Jing, le livre des mutations : celui de « message, nouvelles, informations ».
Tiao, que l’on écrit 调, peut être traduit par « ajuster, réguler, équilibrer, contrôler, provoquer, inciter, mélanger, harmoniser… ».
C’est dans le cadre de cette richesse sémantique que l’on traduira donc Tiaoxi par « régulation du souffle ».
GENERALITES et PREPARATIONS
Comme pour toute pratique de qigong, l’on s’exercera dans un état aussi calme et détendu que possible.
Que l’on soit debout, assis ou allongé, la posture devra permettre à la respiration d’être aussi libre que possible.
L’on veillera donc tout particulièrement à la bonne tenue de la tête (le bout du nez regarde la pomme d’adam, la pomme d’adam regarde Yuzhen, Yuzhen regarde Baihui) afin de dégager la gorge et la nuque.
Dans le même ordre d’idée, il est primordial de veiller à la détente de la taille, du bas du dos et de l’abdomen… D’autre part, afin de « rentrer » dans la pratique Tiaoxi, l’on veillera à entretenir une bonne capacité de l’esprit à rester concentré. La capacité du corps à rester tranquille et détendu tout en gardant l’esprit éveillé et concentré est la clé de la réussite. Pour cela, pas de pratiques excessives, s’exercer à sa mesure et avancer un pas après l’autre !
1 - COMPTER LES RESPIRATIONS
Sur une respiration naturelle, compter mentalement de 1 à 10, sur chaque inspir et expir (inspir 1, expir 1, inspir 2, expir 2, inspir 3…), arrivé à 10, recommencer à 1, plusieurs fois. Lorsque l’on peut s’exercer longtemps sans distraction de l’esprit, l’on passe au stade suivant, qui consiste à compter sur chaque cycle, un inspir/expir comptant pour 1. Si au bout de quelques centaines de respirations, l’esprit n’a pas dévié de sa tâche et est resté concentré sur ce décompte (ce qui peut prendre quelques mois…), l’on pourra cesser de compter mentalement pour se concentrer sur les mouvements de l’air qui rentre et qui sort. Peu à peu, naturellement, sans forcer, la respiration devient plus longue, plus fine, plus régulière, plus profonde, plus légère. L’esprit est calmé.
Effets : Pour calmer l’esprit et permettre une respiration plus profonde. On commence en général par cet entrainement pour aborder les autres techniques de Tiaoxi.
2 - EQUILIBRER LE YIN ET LE YANG (LATERAL)
Le pouce de la main droite sur la narine droite, l’index sur le point entre les sourcils, le majeur ou l’annulaire narine gauche. Inspirez par la narine gauche en fermant la narine droite, expirez à droite en fermant à gauche. 36 fois, puis changez de coté et de main. Inspirez à gauche, expirez à droite, 36 fois également. Avec l’habitude, l’on peut se passer de fermer la narine avec le doigt. L’utilisation de l’esprit suffit.
Effets : Equilibre le Yin et le Yang. Très utile pour les personnes ayant de la difficulté à rester calme et concentré.
3 - EQUILIBER LE YIN ET LE YANG (VERTICAL)
En inspirant, conduire par la pensée l’esprit et le souffle depuis le sommet du crâne jusqu’au nombril, le haut de l’abdomen se gonfle. Simultanément, conduire du milieu de la plante des pieds au nombril en creusant le milieu des pieds, orteils légèrement enroulés, le bas de l’abdomen se creuse. En expirant, relâcher l’abdomen, et ramener tranquillement la pensée au sommet du crâne, aux pieds, et au-delà, jusqu’au vide qui nous entoure. Effets : Harmonise le Yin et le Yang dans tout le corps, rassemble l’énergie au Dan Tian. Cette pratique peut être utilisée seule ou combinée avec d’autres méthodes du Zhineng Qigong, tel que « Trois centres se rassemblent »
4 - DAN TIAN INFERIEUR (voir article cité)
5 - DAN TIAN MEDIAN (voir article cité)
6 - LE VENT QUI TOURNE
Inspirez par le nez en guidant l’esprit et le souffle à l’intérieur du crâne puis en descendant le long de la colonne vertébrale jusqu’au point Jizhong (11eme dorsale). Revenir par exactement le même chemin à l’expiration. Au niveau du nez, l’air passe par les narines, alors que le Qi passe par la cloison nasale. Avec l’habitude, l’on veillera à suivre de préférence le trajet du Qi dans la cloison nasale. D’autre part, il importe, concernant le chemin à suivre de ne pas être trop rigide, d’être comme un peu absent, de rester flou concernant la pratique. L’on essayera cependant, pour la colonne vertébrale, de bien rentrer en profondeur, jusque dans la moelle épinière, pas seulement dans les os.
Traditionnellement, « le vent qui tourne » est considéré comme une technique efficace afin d’atteindre l’état de divinité ou d’immortel… Elle permet en tout cas de développer la perception du passage du Qi par la cloison nasale. Cette pratique dirige le Qi dans le sens opposé à la circulation normale des méridiens Dumai et Renmai. Pour cette raison, l’on abordera cette pratique lorsque ces méridiens auront déjà été bien appréhendés. Par cette pratique, un Qi purifié va être activé afin de débloquer tous les méridiens et renforcer toutes les activités du corps.
7 - RENFORCER LE QI
En inspirant, suivre le chemin précédent, mais continuer après Jizhong. Passer le coccyx et le périnée pour arriver au Dan Tian, que l’on situe généralement vers le bas et en arrière du nombril. A la fin de l’inspir, faire une pause respiratoire en maintenant l’attention au Dan Tian, puis expirez tranquillement, sans mettre aucune intention particulière. Dans cette pratique, la durée de l’inspiration est plus longue que celle de l’expiration.
Effets : Du fait de la tonification générale engendrée, cette technique est spécialement recommandée pour les personnes temporairement affaiblies, ou les personnes âgées. La pause respiratoire en fin d’inspiration pourra être allongée jusqu’à 14 secondes en cas de besoin. Cette pratique renforce le Qi originel et fortifie le Jing ainsi que le Qi des reins.
8 - LES SEPT PORTES DU CANAL CENTRAL
Placer sept « balles » imaginaires le long de l’axe central du corps. La première quelques centimètres au dessus du périnée Huiyin. La deuxième, la plus grosse, au Dan Tian, en arrière du nombril. La troisième au Hunyuan Qiao, au creux de l’estomac. La quatrième derrière le centre du sternum, au Dan Tian médian. La cinquième derrière la pomme d’adam, la sixième au centre de la tête, derrière Yintang et la septième sous le sommet du crâne.
Après avoir inspirer profondément, garder le souffle. Monter le point Huiyin, puis quitter ce point et placer son esprit sur la première balle pendant une seconde, et ainsi de suite, en restant une seconde sur chaque balle. Arrivé en haut, à la septième balle, revenir à la sixième, cinquième, quatrième pour finir à la troisième, toujours pendant une seconde. Expirer normalement pour finir. La rétention de souffle, poumons pleins, dure donc une douzaine de secondes. L’on pourra, en cas de gêne respiratoire, reprendre son souffle en restant sur une balle, pour ensuite continuer la pratique là ou on l’avait laissé. Lorsque l’habitude aura rendue plus facile la concentration sur les balles, on les fera tourner sur elles même, dans le sen qui se présente, lors de chaque station d’une seconde. Il est recommandé de pratiquer ainsi 9 respirations, entrecoupées de pauses si le besoin s’en fait sentir.
Effets : Développe la perception du canal central Zhongmai. Traditionnellement, un des objectifs de cette méthode est de retrouver l’état prénatal, avant la naissance. Il s’agit d’une ancienne technique de « l’école du Hunyuan Gong ». Agissant directement au niveau du Zhongmai , c’est une des techniques majeure de Tiaoxi du Zhineng Qigong.
9 - PORTE CELESTE (voir article cité)
10 - RESPIRATION PAR LA PEAU
Pour cette technique, la respiration physique est au second plan alors que les mouvements du Qi sont fortement ressentis. A défaut, au début, l’on s’aidera de l’imagination. En oubliant la respiration et les mouvements de l’air, en inspirant, le Qi extérieur rentre à l’intérieur du corps, par tous les pores de la peau, jusqu’au Hunyuan Qiao. En expirant, le Qi retourne à l’extérieur du corps jusqu’aux confins de l’univers.
Effets : Développe la respiration prénatale, dite « embryonnaire ». Fait rentrer l’énergie extérieure à l’intérieur du corps. Renforce le champ d’énergie individuel et donne de grandes capacités pour influer sur le monde qui nous entoure.
POUR ALLER PLUS LOIN
En général, même en prenant conscience de notre respiration, nous ne portons que peu d’attention à l’intervalle entre chaque inspire et chaque expire. Pourtant, pour un pratiquant de Qigong, ce temps de pause, d’apnée, est invitation constante à rentrer dans la tranquillité. L’esprit, pendant ces instants de repos, est particulièrement calme. En développant cette perception, le pratiquant atteint un haut niveau de conscience. Cette pause respiratoire, quelle soit poumons pleins ou poumons vides, qu’elle dure une seconde ou une minute, sera toujours vécue comme un temps de détente et de tranquillité, jamais comme un temps d’efforts et de tensions. Elle sera comme une porte ouverte, une invitation à aller voir ailleurs, au-delà, peut être, des apparences.
D’après le Dr Pang Ming. Rédaction : Yves Lorand